dans Notes de lecture

Le bonheur n’est pas compatible avec la conscience ("Salut Marie" : the good, the bad and the ugly)

salut Marie (enveloppe)

Grâce à la légende que les bloggeurs ont fait courir avec tant de succès sur leur influence en général et leur influence sur les chiffres de ventes en particulier, j’ai reçu un exemplaire de “Salut Marie” de Antoine Sénanque. J’ai juste cru comprendre que ce roman est en piste pour le prix Fémina et que je ne suis pas le seul blogueur a bénéficier de ce que dans le métier on appelle un “service de presse” (en clair : recevoir le bouquin gratis).

Je me suis efforcé de ne pas me renseigner sur ce bouquin : pas de googlage du nom de l’auteur, pas de lecture des critiques. Pour la petite histoire, c’est avec ce bouquin que je comptais inaugurer la méthodologie “The good, the bad and the ugly” mais un dossier plus urgent s’est présenté.

La direction signale à son aimable clientèle que beaucoup de texte dans une section “ugly” et peu dans “good” ne veut pas forcément dire que j’ai détesté, et inversément.

La préparation d’artillerie étant achevée, il est temps de passer aux choses sérieuses (ma poupée jolie).

The good (sans aucun ordre particulier) :

– J’aimerais bien boire un verre à la terrasse de Félix, un jour, juste une fois. Seulement voilà, je n’ai pas l’adresse.

Lourdes Snow Globe

– Un livre qui commence par

“La vierge m’est apparue le 1er avril 2008. La date était mal choisie”

peut-il être mauvais ? Avec un début pareil, la sensation d’anti-climax est inévitable, mais c’est peut-être voulu. L’histoire serpente son petit chemin sans cahots notables, nous découvrons ce qui se passe dans la vie du narrateur, de son entourage et de son rapport à la religion, la mort, la vie tout ça… quand La Vierge (non, pas celle-là. pas celle-ci non plus) décide de lui apparaître. Va -t- il redresser la courbe des sondages de François Hollande ? Va -t- il sauver les comptes de Dexia avec un bout de ficelle, deux agrafes et un mouchoir en papier ? Va -t- il s’en tenir à une variété plus traditionnelle de miracle ? Va -t- il seulement faire un miracle ?

– Les chapitres sont courts et ne trainent pas en route. Je ne sais pas s’ils ont été écrits longs et élagués par la suite ou s’ils ont été écrits courts directement.

Allez quelques extraits qui ne révèlent pas trop de l’intrigue :

Ma belle-soeur pédale aux côtés de son époux avec des petites boules clignotantes en couronne autour de son casque pour signaler sa présence à son prochain afin qu’il ne se précipite pas sur elle. Précaution qui m’a toujours semblé inutile.

et aussi :

– Tu vas aller à Lourdes ?
– Oui.
– Rapporte de l’eau. Pour mes plantes.

– La phrase “Le bonheur n’est pas compatible avec la conscience”. Ca ferait un titre assez cool pour ce post, tiens…

– La trouvaille du mur chez le psy (en dire plus serait gâcher).

– La visite au père du narrateur de la page 119.

The bad (sans aucun ordre particulier) :

– Pourquoi est-ce que les chapitres n’ont pas de nom ?

– Les noms et prénom des personnages. Gros dossier.

  • On a un évêque qui s’appelle “Monseigneur Douze” huhuhu
  • On a des personnages féminin qui s’appellent Mariette, deux frères qui s’appellent Pierre et Simon. (Tu es Pierre et sur cette pierre…).
  • Un personnage se prénomme “Blanche”. C’est pas un synonyme de “vierge”, ça “blanche” ?
  • J’ai lu “Salut Marie” par bribes et morceaux et à chaque fois que je le reprenais, à chaque personnage féminin cité par un prénom, je devais faire un effort : qui sont Rose(-Marie), Solange, Mariette ou Mathilde par rapport au narrateur, déjà ?
  • On a Félix (”heureux” en latin”)…
  • Nom de l’auteur : Antoine Sénanque. Nom du narrateur : Pierre Mourange. *tousse*
  • Un ami du narrateur est d’origine vietnamienne et se prénomme Tû. A chacune de ses apparitions, j’ai été agacé de lire “Tû [verbe conjugué à la troisième personne]. « Tû mange » là où, machinalement, j’avais envie de lire « Tu manges ». Vu les choix des noms des personnages, je me demande quel non-hasard a guidé ce choix de nom.
  • On a un personnage dont le nom de famille est “Kirchoff”. Le hasard quand même…

– A part ça heu… à part un passage où les événements se déroulent tellement vite qu’on jurerait qu’il y avait un chapitre en trop, qu’il a été supprimé et résumé, sinon c’est tout.

The ugly (sans aucun ordre particulier) :

– Pitié. Pitié. Pitié. S’il vows plaît. Pretty-please with cherry on top : dans l’état où se trouve le cinéma français actuel merci de ne vendre les droits d’une adaptation cinéma qu’à un cinéaste intègre, en insistant sur un casting qui nous épargne les abonnés du grand écran. S’il vous plait.

– Bon alors, Antoine, tu vas un peu prendre pour les autres alors que tu es loin d’être le seul en cause mais… Quand est-ce que la littérature germano-pratine va guérir de son syndrome immuno-proustien aggravé ?

Celui qui n’est pas d’accord avec la phrase “Marcel Proust était un génie de la littérature” peut sortir, cracher deux dents, commencer à saigner et m’appeler pour que le finisse. Seulement voilà… Pourquoi êtes-vous autant à utiliser son procédé “un narrateur qui n’est pas l’auteur mais un peu quand même” ? On va devoir se farcir ce procédé combien de siècles avant le come-back de la narration à la troisième personne ?

On ne va pas se mentir : dans chaque texte de chaque auteur, sauf le Moniteur Belge et l’annuaire du téléphone (et encore…) il y a un peu de l’auteur. Dans la fiction, il y a un peu de l’auteur dans chaque personnage (les miens compris). Une fois qu’on l’a accepté, une fois qu’on sait quelle part de soi on met dans quel personnage, le fil narratif devient tout de suite beaucoup plus simple à dérouler.

Antoine, mon gros lapin, tu y réfléchis pour ton prochain? Même sans le recevoir gratis, il m’intéresse. Merci-bisous.

Crédit photo : World of Oddy

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