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Retour à la normale dans 720 heures

Ce post est programmé pour s’afficher à 00h01 ce 1er juin 2007. Le moment précis où les feux rouges au-dessus de la piste du Script Frenzy s’éteignent d’un seul coup. Les moteurs à idées vrombissent. Les mains s’élancent sur le clavier, à la rencontre de la première chicane. Partout sur la planète, des milliers de personnes, le coeur battant, sont en train de taper :

FADE IN :

Et puis le moment magique : choisir entre INT. et EXT., décider si le meilleur endroit pour situer la première scène du scénario c’est une table de cuisine en formica dans un trois-pièces en enfilade, une montgolfière arrimée au sommet du Taj Mahal, un aparté à la table du conseil de Sécurité des Nations Unies ou bien dans un Space Cruiser quelque part entre Alpha du Centaure et Bételgeuse.

Est-ce que c’est le protagoniste qui va ouvrir la bouche en premier ? Ou le méchant ? Est-ce que la première page donne bien envie de lire les 120 suivantes ? Est-ce que le thème est bien tricoté dans toutes les pages ? Est-ce que chaque set-up a son pay-off ? Est-ce que ce qui se passe est plausible ? Est-ce que l’incrédulité du spectateur est baillonnnée comme il faut ? Est-ce que chaque personnage a sa « voix » ? Est-ce que la structure est bien torchée ? Est-ce que la fin est évidente, spectaculaire et surprenante ? Est-ce que le texte se transformera en bobines de pellicule un jour ? Est-ce que des spectateurs liront un jour les mots « written by » suivi de votre blase, dans une salle obscure ? (Dans le cas de ma participation 2007, je vous rassure, sauf si un de mes lecteurs est avocat d’affaires, ceinture noire en négociation avec des ayant-droits : snow ball chance in hell.)

C’est pas comme si je savais par expérience que ce mois de juin va être intéressant. Que les événements vont se bousculer pour m’arracher à mon DiNovo Edge. Que j’ai trois épisodes de Grand Darjeeling Hôtel à sortir en parallèle. Qu’un « mystérieux projet éditorial » réclame également mon attention. Que la réalité va se prendre par la main pour frapper à ma porte. Que les sirènes de la procrastination vont chanter à mes oreilles.

Mais une chose est sûre : je vais prendre un pied énorme pendant un mois. Dans 30 jours environ, dans 720 heures, si tout se passe comme la dernière fois, je serai à ramasser au microscope électronique, mais j’aurai appris des choses dans l’art de raconter une histoire. J’aurai progressé dans cette noble discipline.

En ce moment, je regarde l’impossible dans les yeux, dans quelques instants je lui aurai balancé son paquet de cartes truqué à la face. Je suis en train de lui lancer un défi : rendez-vous dans 720 heures moins deux minutes dans la grand’ rue, devant le saloon. Et à l’issue de ce duel, c’est l’impossible qui grimacera, une main sur le coeur, une bastos dans le myocarde, en train de se demander ce qui lui est arrivé. C’est moi qui rengainerai mon Colt encore fumant en balançant une catch-phrase définitive vers la caméra.

Du moins j’espère…

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